Millème dernière danse
Millième dernière danse
Ballet des dernières chances
Musée de tes sourires
Théâtre de tes soupires
Échanges qui t'intriguent
Passages qui te fatiguent
Oeillades en clair-obscur
Regards devenus durs
Présence sans contraintes
Absence en demi-teinte
Tu ris toute la nuit
Tu cris sans faire de bruit
Je tends un fil d’argent
Tu t'éloignes doucement
Un souffle entre deux ligne
Un battement qui décline
Et dans ce bal figé
Tu tournes sans bouger
Introduction
Ce poème bref et condensé explore l’instant fragile où la relation vacille, suspendue entre attraction et éloignement. Son univers est celui d’une scène immobile, presque théâtrale, où les gestes, les regards et les silences prennent plus de place que les actes. L’atmosphère est élégiaque, marquée par une tension douce entre mouvement et immobilité, présence et effacement.
Axes thématiques
Plusieurs lignes de force structurent le texte et lui donnent sa densité émotionnelle.
- La danse comme métaphore relationnelle : la « millième dernière danse » évoque un rituel répété jusqu’à l’usure, où chaque pas semble être le dernier sans jamais l’être vraiment.
- Le théâtre des apparences : musée, théâtre, ballet composent un champ lexical de la mise en scène, suggérant une relation figée dans ses rôles, observée plus que vécue.
- La dualité présence / absence : le poème joue constamment sur les contrastes — rires et cris silencieux, présence libre et absence atténuée — traduisant une relation désaccordée.
- L’éloignement progressif : le fil d’argent tendu, fragile lien affectif, se distend à mesure que l’autre s’éloigne, sans rupture brutale mais avec une douceur presque cruelle.
Écriture et musicalité
L’écriture repose sur des vers courts, souvent construits en binômes, qui créent un effet de balancement proche de la danse évoquée. Les rimes discrètes et les assonances renforcent la musicalité feutrée du poème, tandis que l’alternance de mots concrets et abstraits installe un clair-obscur émotionnel.
Le vocabulaire est volontairement épuré, mais chargé de symboles : clair-obscur, fil d’argent, souffle, battement. Ces images suggèrent la fragilité, la limite, l’instant juste avant la disparition. La progression du texte ralentit peu à peu, accompagnant le déclin évoqué dans les derniers vers.
Lecture sensible
La lecture laisse une impression de mélancolie contenue, presque élégante. Le poème ne décrit pas une rupture franche, mais l’épuisement d’un lien qui continue de tourner sur lui-même. Le lecteur ressent cette fatigue émotionnelle, cette danse intérieure où l’on avance sans avancer, où l’on tourne « sans bouger ». Le texte agit comme un miroir des relations suspendues, de ces moments où l’on sent que quelque chose s’achève sans parvenir à le nommer.
Conclusion
Ce poème trouve sa force dans sa retenue et sa précision. En quelques images soigneusement choisies, il capture l’essence d’un lien à bout de souffle, figé dans sa propre chorégraphie. Sa portée universelle réside dans cette capacité à dire l’entre-deux, cet espace fragile où l’amour ne meurt pas encore, mais ne vit plus vraiment.