Le Fauteuil
Il me faut
Ce que je sais déjà
Pas l’exploit
Le risque
Le cœur neuf
Non
La petite trahison
Que je pourrai nommer :
Ah, c’est ça
Le défaut qu'on a mis
Sur la liste des courses
Le mauvais pli du caractère
Que l’on peut repasser
Pour en faire
Un oreiller
Car les inconnus
Celui qui se lève le matin
Celle qui tente une autre histoire
Ils nous fatiguent
Ils nous demandent d’être
Meilleur
On veut
Le confort douillet
De ta misère exacte
Pour être sûr
Qu’il n’y aura
Rien à changer
Introduction
Ce poème explore le désir de familiarité et de confort dans les relations humaines, préférant la certitude du connu aux exigences de la nouveauté. L’atmosphère est introspective, teintée de lassitude et de réalisme affectif, où le besoin de sécurité et d’acceptation l’emporte sur l’élan vers l’inconnu ou l’exploit.
Axes thématiques
Le texte déploie plusieurs thèmes principaux.
- La recherche de confort et de prévisibilité : le narrateur aspire à ce qu’il connaît déjà, refusant le risque et l’inconnu. La « petite trahison » et le « mauvais pli du caractère » deviennent des repères rassurants, presque des objets de tendresse.
- La fatigue des relations : l’autre, inconnu ou différent, demande un effort constant — « Ils nous demandent d’être meilleur » — ce qui suscite un désir de retrait vers ce qui est stable et familier.
- L’acceptation des défauts : le poème valorise l’idée de s’accommoder des imperfections, de les transformer en confort (« Pour en faire / Un oreiller »), célébrant la complicité dans l’ordinaire et le connu.
- La critique implicite de l’idéalisation : en rejetant l’exploit et la nouveauté, le poème suggère que le bonheur tient moins dans la perfection ou l’aventure que dans la stabilité et l’authenticité partagée.
Écriture et musicalité
L’écriture est concise, faite de phrases courtes et de ruptures qui créent un rythme saccadé, proche de la pensée ou du dialogue intérieur. Les vers libres et l’absence de ponctuation lourde accentuent la fluidité et l’intimité du texte.
Le vocabulaire est simple mais précis, conjuguant réalisme et poésie : oreiller, mauvais pli, misère exacte. Les répétitions — « Ce que je sais déjà », « Rien à changer » — renforcent l’idée de constance et de sécurité recherchée.
Lecture sensible
La lecture provoque une impression de douceur teintée de mélancolie. Le lecteur ressent le besoin de sécurité et de familiarité du narrateur, ainsi que la lassitude face aux exigences de l’inconnu. Il y a un mélange de tendresse, d’acceptation et de réalisme, qui rend le poème à la fois intime et universel.
Conclusion
Ce poème met en lumière le désir humain de confort et de certitude dans les relations, valorisant la complicité et l’acceptation des défauts plutôt que la recherche de nouveauté ou de perfection. Par sa sobriété et son rythme intérieur, il fait émerger une réflexion subtile sur ce que signifie se sentir en sécurité et aimé, exactement tel que l’on est.